
Ranger la scène, découverte d'un contre-la-montre rituel
25 à 30 minutes. C'est l'intervalle moyen entre deux pièces dans les théâtres du OFF. Programmer une dizaine de spectacle dans la même journée impose aux compagnies d’œuvrer dans l'urgence à la fin d'un spectacle. Car l'entre-deux comprend aussi le temps d'installation pour les artistes suivants. Une troupe a donc 15 minutes en moyenne pour vider et nettoyer si besoin la scène.
"15 minutes c'est à la fois court et long. Court car quand on met le bordel comme moi, à renverser partout des bidons d'eau, de la bière ou encore de la mousse à raser, il faut passer la serpillière en plus de dégager le mobilier, raconte Alexandre Pavtala, dont le one-man-show "Francky O'right" est une ode à la dévastation de scène. Et en même temps, c'est fascinant de voir ce que tu peux réaliser dans ce laps de temps. Je pense aux troupes dont les décors sont encombrants, volumineux. Eux ils doivent galérer". Pour cela, nous sommes allés assister à la pièce "Le cercle de craie",interprété par la compagnie l’Éternel été, nouvelle venue au OFF.
"Pas facile de manipuler ces grands modules"
Les applaudissements se font encore entendre au moment où les comédiens de l'Eternel été s'activent derrière le rideau entrain de se refermer. Si le décor est épuré d'accessoires, dix palettes à roulettes et de grandes arches trônent sur la scène. Le voile rouge sépare le public des artistes, le chronomètre est lancé. Grand et musculeux, Geoffrey donne le rythme : "Allez on envoie maintenant, on se réparti les rôles. Quelqu'un vient avec moi pour s'occuper des arches. Les trois autres, commencez par amener les palettes dans la salle des accessoires". Lourdes d'une bonne vingtaine de kilos chacune, les palettes sont poussées le plus vite possible par trois comédiens.
Pendant ce temps, les deux autres s'attaquent aux arches. Une fois posées à plat, il faut désencocher les différentes parties pour leur permettre de passer les portes des coulisses. Elles n'en demeurent pas moins rigides du fait de leur fabrication en bois : "Ce n'est pas facile de manipuler ces grands modules, souffle Geoffrey. Il y a des encoches et des vis toujours aussi compliquées à défaire, c'est le prix pour avoir un décor solide".
Une fois les palettes rangées, toute l'équipe s'attelle à transporter les pièces des arches. La jeune Sarah, poids plume de la troupe, impressionne ses partenaires en multipliant à toute vitesse les allers-retours. Tout le matériel est rangé, la scène balayée en quelques instants. Les artistes peuvent souffler. L'un d'eux attrape son téléphone et regarde l'heure : "12 minutes, on a bien pris le rythme depuis une semaine. Les premières fois c'était tendu, on a plus de temps d'habitude. Mais c'est aussi ça Avignon", sourit-il.
